Le traintrain peut finalement se révéler parfois surprenant...

C’était d’humeur curieuse que s’était levé Rei, ce matin-là. Il était encore tôt, peut-être vers les sept heures et il décida d’aller faire une promenade dans les montagnes afin de remplir ses petits poumons d’air pur et de pouvoir s’aérer l’esprit. Parce qu’une bonne hygiène de vie était importante pour les psychologues qui devaient porter le poids de tous les soucis des autres sur les épaules.
Ils voyaient bien évidemment d’autre psychologues afin de se décharger de ce poids-ci mais il n’aurait un rendez-vous qu’à la fin du mois alors, jugeant que c’était trop tard, il voulu changer un peu son quotidien.
De plus, c’était le week-end alors il pouvait en profiter pour rentrer aussi tard qu’il voudrait pour pouvoir dormir tranquillement le lendemain matin (s’il ne trouvait pas le moyen de rentrer accompagné, bien sûr).

Il regarda par la fenêtre pour se donner envie et vit un beau ciel limpide d’un bleu moucheté de quelques tâches de nuages blancs qui lui donnait un aspect de prairie turquoise avec des milliers de petits moutons blancs un peu éparpillés partout. Le psychologue en deviendrait presque poète.
Un petit sourire de bonheur étira ses minces lèvres rosées tandis qu’il troquait son kimono indigo qui lui avait servit de pyjama pour un jean bleu clair assez serré qui mettait bien ses longues jambes en valeur ainsi qu’un tee-shirt simple gris qui représentait un ciel plutôt orageux tandis qu’une main tenant un spray nuageux commençant à transformer ce paysage morne en un superbe ciel bleu comme son pantalon. C’est qu’il aimait accorder ses couleurs le jeune psychologue !
Il mit de simples converses grises en guise de chaussures et coiffa ses cheveux qui lui arrivaient jusqu’au bas du dos et mit des lunettes aux branches grises.

Parfait.

Rei prit donc le train et passa sa journée à se balader dans les montagnes tel un cabri (belle comparaison, n’est-ce-pas) en sautant de l’une à l’autre, en escaladant, en observant les jolie fleufleurs… Bref, en se comportant comme un parfait promeneur.
Il se fit même le défi de monter sur la plus haute d’entre elles et lorsqu’il fut arrivé en son sommet, il s’étala par terre en observant les mouvements des nuages dans le ciel. Là, il pensa à son passé, à ses problèmes d’antan qui lui paraissaient si loin, maintenant. Il repensa également à ses nouvelles rencontres, à ses futures rencontres et à tout un tas de choses. Sauf au boulot, bien entendu. Il était là pour se détendre et non pour se prendre la tête avec son métier.
Bien sûr qu’il aimait son métier mais là, il était en jour de repos alors il se reposait autant physiquement que mentalement.

Le jeune homme regarda alors l’inclinaison du soleil, n’ayant pas de montre sur lui car il trouvait cet accessoire plus stressant qu’autre chose, et il vit qu’il était midi alors il se décida à se trouver une auberge afin d’y passer son midi.
Pour l’après-midi, il se balada tout autant partout et vit même une visite guidée d’un temple avant de continuer sa route. Le Japon était un pays qu’il trouvait véritablement passionnant autant par les personnes qui y vivaient que par les paysages mais aussi par leur histoire et leurs coutumes. Il aimait beaucoup apprendre tout ça et avait véritablement été passionné par cette journée et c’est un psychologue rougissant à cause de toutes ces émotions, de l’air frais et de l’exercice qui s’engouffra dans la gare avant de monter dans le train qui venait d’arriver.

Celui-ci démarra normalement et il observait le paysage qui défilait avec un air gourmand, un air curieux qui furetait à la recherche du nouveau. Si bien qu’il ne fit absolument pas attention aux autres personnes présentes dans le compartiment alors que, d’habitude, son activité favorite était d’observer les personnes l’entourant pour pouvoir les analyser. C’était comme une espèce de jeu, de défi qu’il se faisait à lui-même.
Le train arriva à la gare suivante et c’est là qu’il entendit le message :

« Mesdames et messieurs, en raison d’un problème technique sur la voie, nous nous voyons dans l’obligation de stopper ce train en direction de Kyoto. Le problème sera sûrement réglé dans une heure mais nous vous demanderons de nous accorder une demi-heure de plus afin de pouvoir rattraper tous les retards. Merci d’avance. »

Oh bah non ! Il allait devoir attendre dans un coin qui semblait à première vu complètement paumé pendant une heure et demie ?
Poussant un soupire déçu, le jeune homme aux longs cheveux noirs se leva pour sortir de ce train et essayer d’explorer un peu le village pendant tout ce temps-là mais il percuta quelqu’un si violemment qu’il commença à se sentir chuter en arrière et qu’il se rattrapa sans vraiment savoir comment à un siège. Encore sous le choc, il balbutia :

« Oh…Je…Excusez-moi. »

Se relevant, il se reprit après ce léger instant de panique pour laisser toute son assurance revenir, il venait de percuter un jeune homme châtain qui semblait être de son âge, le voyant à terre, il lui offrit son sourire le plus charmeur en lui tendant la main pour l’aider à se relever :

« Rien de cassé ? »

Il n’avait pas encore reconnu son directeur qu’il avait l’habitude de voir si stricte et toujours en costume/cravate…

Comme un week-end sur deux, Mael venait de passer celui-ci à Nagoya. Il y allait principalement pour rendre visite à son père à l’hôpital. Atteint d’un cancer en phase terminale, il avait été déplacé dans cet hôpital qui disposait de plus de moyens que celui de Kyoto. L’ancien directeur allait de plus en plus mal, ce qui désolait son fils, qui n’y pouvait malheureusement rien. Il passait donc ces deux jours avec son père, lui tenant compagnie et discutant avec lui. Heureusement, il avait encore toute sa tête, et n’était que plus heureux de voir son fils régulièrement. Ainsi, il prenait des nouvelles du pensionnat, trouvant toujours moyen de plaisanter sur quelque chose.

Enfin bref, la première journée s’écoula, et Mael passa la nuit dans l’hôtel qu’il avait prit l’habitude de réserver à chaque venue. Le lendemain matin, il avait fait un tour rapide en ville pour se changer les idées, avant de revenir voir son père. Il en profita aussi pour discuter à part avec le médecin, qui ne lui dona pas vraiment d’avis favorable sur l’évolution de cette maladie. C’était prévisible, mais cela ne contribuait pas tellement à la bonne humeur de Mael. Il profita de ses moments avec son géniteur jusqu’au dernier moment, l’heure de retourner direction la gare, s’il ne voulait pas manquer son train.

Pour une fois, lorsqu’il arriva à la gare, il put remarquer que son train n’avait pas de retard, et partirait à l’heure. Il entra dans le wagon numéro quatre, et chercha la place qui lui avait été attribuée. Côté couloir... Il n’aimait pas du tout cette place, mais il n’avait pas eu le choix. Ou plutôt, il avait oublié de demander à être placé côté fenêtre. Malheureusement, la place à côté n’était pas libre, il ne pouvait donc la piquer le temps du trajet. Il soupira et s’installa quand même, faisant à moitié la gueule.

Quelques dizaines de minutes après le départ, et quelques arrêts plus loin, une voix féminine leur annonça que le train allait devoir rester immobilisé dans cette gare pour une longue durée, en raison d’un problème technique. Ben voyons ! C’était bien douteux, ce départ à l’heure, il fallait bien qu’il arrive quelque chose un peu plus loin. Et c’est carrément une heure et demie qu’ils allaient devoir attendre. Et tant qu’à attendre, autant faire quelque chose, que de rester assis là à rien faire. Il se releva donc, dans le but de sortir du train. Mais en se relevant assez brusquement, il ne fit pas attention à la personne qui arrivait derrière lui à ce moment là, et fut projeté en avant. Surpris par ce choc, il n’eut le réflexe de se rattraper à quelque chose et finit affalé par terre, sous le regard amusé des personnes environnantes. Il leur jeta un regard noir, tandis qu’une main se présenta à lui, en même temps qu’une voix masculine lui demandait s’il allait bien. Le directeur releva la tête en attrapant cette main, et s’y aidant pour se redresser.

Merci, ça va.

D’humeur maussade, c’est sans aucun sourire qu’il observa « agresseur ». Bon OK, c’était un peu sa faute, il aurait du regarder avant de quitter son siège, mais l’autre aurait pu aussi anticiper un peu, et avancer moins vite aussi. C’est alors qu’il reconnu l’un de ses employés au pensionnat. Ça alors, quel hasard ! Il fallait quand même un sacré concours de circonstances pour qu’ils se retrouvent dans un train. Du coup, Mael retrouva un peu le sourire (enfin, c’est surtout qu’il ne pouvait pas vraiment faire la gueule sans raison à un de ses employés).

Oh, Hanamomo-san ! Quel hasard ! Vous rentriez à Kyoto, je suppose.

De nature pourtant pas tellement bavard, Mael était plutôt enchanté de retrouver une « connaissance ». Ils n’avaient jamais vraiment discuté en dehors du boulot, et ne se connaissaient pas plus que ça. De plus, ils allaient devoir attendre un certain temps avant de pouvoir reprendre le train, et Mael n’avait pas tellement envie de le passer seul. Au final, cette rencontre tombait bien. Enfin, encore fallait il qu’il accepte de passer le temps avec lui. Et qu’il lui demande, tant qu’à faire, sinon il ne risquait pas d’avoir de réponse. Ce qu’il fit, après un léger temps de pause :

Puisqu’on a du temps avant le départ du train, passons le ensemble, si ça vous dit ?

Un bref regard autour lui fit remarquer les gens autour qui s’impatientaient, les deux hommes bloquant le passage vers la sortie. Il n’attendit alors pas la réponse de son employé, et récupéra ses affaires pour se diriger vers la sortie, sans un regard vers ceux qui rouspétaient. Une fois sur le quai, il fit quelques pas pour s’éloigner, et attendit près du mur, le psy qui devait suivre non loin.

L’homme lui répondit d’une voix qui lui était étrangement familière :

« Merci, ça va. »

Mais le psychologue avait l’habitude de souvent reconnaître les personnes puisqu’en tant que psychologue, il avait une mémoire assez développée pour se rappeler de chaque client mais aussi parce qu’il possédait de nombreux amants. Il avait d’ailleurs pour principe de ne pas coucher deux fois de suite avec la même personne et de la larguer le vite possible après tout ça.
D’ailleurs, la personne qu’il venait de renverser n’avait pas l’air de très bonne humeur alors Rei pensa qu’il en était fini des politesses et qu’il faudrait mieux déguerpir le plus vite possible, malheureusement, l’homme barrait la route avec son corps. La fuite était donc impossible.
Celui-ci releva enfin le visage et le jeune homme aux longs cheveux noirs reconnut avec étonnement… Son supérieur hiérarchique ! C’est vrai qu’il l’avait toujours vu si sérieux dans son costume/cravate qu’il n’aurait jamais pu penser que celui-ci pouvait quitter l’enceinte de l’établissement et s’habiller avec un jean et des baskets !
D’ailleurs, en y regardant de plus près, Rei observa avec ravissement qu’il n’avait jamais remarqué à quel point le directeur était beau : grand, des cheveux mi-longs aux reflets caramel, de grands yeux noisette… Hum… On aurait dit la description d’un dessert que le psychologue aurait bien dévoré.

Mais c’était son SUPERIEUR HIERARCHIQUE. Et on ne couchait pas avec son supérieur. A moins qu’on ne veuille une promotion et ce n’était pas le cas du jeune homme. Mais…Mais…Mais… C’était obligé de ne pas pouvoir juste un peu ?
Il fut coupé dans ses pensées :

« Oh, Hanamomo-san ! Quel hasard ! Vous rentriez à Kyoto, je suppose. »

Avec le même ton enjoué, le psychologue répondit :

« Monsieur Fujiwara, en effet, quel hasard ! Oui, je rentre de Kyoto, je visitais le coin, charmant n’est-ce-pas ? »

Il y eu un temps de pause. De quoi parler avec son supérieur ? Ils étaient en dehors là… Donc peut-être devraient-ils se comporter comme deux personnes normales, non ? Et puis… Ils avaient environ le même âge même si Rei savait que l’autre était son aîné d’un an.

« Puisqu’on a du temps avant le départ du train, passons le ensemble, si ça vous dit ? »

Toujours avec autant de tact, de délicatesse mais avec un zeste de prudence :

« Avec plaisir, monsieur, avec plaisir. Le temps me paraîtra moins long avec une charmante compagnie telle que la vôtre. »

Un sourire charmeur accompagnait sa phrase mais il se tut. Il ne voulait pas non plus paraître détestable aux yeux du directeur et ne savait pas spécialement à quoi s’attendre avec lui. A vrai dire, ils avaient déjà échangés quelques paroles, deux/trois fois mais bizarrement, ils n’étaient pas si proches que ça. Lorsqu’on devient adulte, c’était comme si l’âge n’avait plus aucune importance et que, contrairement au stade de notre enfance, cela ne nous rapprochait plus.
De plus, il y avait aussi la différence des ethnies. Rei se doutait bien que son directeur n’était peut-être pas à 100% japonais mais il n’avait strictement aucune idée des origines de celui-ci et ne pouvait donc pas parler du passé. C’était fâcheux. Terriblement fâcheux puisqu’ils n’avaient absolument rien en commun.

Les deux jeunes hommes sortirent de la gare et arrivèrent dans un petit village à l’ancienne complètement vide. Le genre de coin paumé qu’on n’a même pas envie de connaître. Pourtant, le psychologue prit un ton enjoué pour déclarer :

« Et si nous cherchions un café afin de passer le temps ? Allez, je vous paye un verre. »

Il lui fit un sourire à la voix charmeur et malicieux mais gardant toujours une politesse correct si bien que le sourire devenait si ambigüe qu’il fallait être un spécialiste pour bien pouvoir l’analyser et en comprendre tous les sens cachés. Et non, si vous y pensez, ce n’était absolument pas dans les plans du psychologue de saouler son supérieur afin de pouvoir mieux abuser de lui dans les toilettes. Il y avait pensé, bien évidemment mais ce n’était pas de sa faute, l’autre n’avait qu’à pas être si sexy dans ses tenues de civil. Notre psychologue n’était que la victime du charme diabolique de Mael, rien de plus ! Et puis… Le jeune homme aux yeux améthystes n’était pas si stupide, il savait qu’il y aurait des conséquences, c’est pour ça qu’il préférait attendre que l’autre soit consentant (xD).
Les collègues marchèrent un instant avant de tomber sur un café à l’aspect miteux. Grimaçant légèrement, le psychologue tenta :

« On essaye ? Peut-être qu’il ne faut pas se fier aux apparences et que ce café en vaut le coup… »

…Même s’il en doutait. Et puis, de toute façon, ils n’avaient pas le choix car il n’y avait rien mais strictement rien dans les alentours alors, c’était soit ça, soit rien du tout !
Déjà, le brun poussait la porte, tout doucement car il avait peur qu’elle lui tombe dessus, pour entrer dans une atmosphère complètement différente : on se serait cru dans un livre fantastique. Les tables étaient fait à l’ancien temps, en bois brut mais on aurait dit qu’elles étaient faites à la main par un troll menuisier, les individus à l’intérieur étaient presque encapuchonnés comme dans ces films avec des sectes. De plus, les vitres étaient tellement crasseuses qu’il faisait sombre à l’intérieur et l’éclairage était fait au gaz mais cela faisait autant de lumière qu’une simple bougie. C’était donc un mélange du vieux Londres et du moyen-âge fantastique. Un peu glauque, tout ça…
Se retournant vers le directeur, Rei ouvrit la bouche en commençant à lui proposer :

« Et si, finalement, nous… »

Il fut tout de suite coupé par une espèce de mégère énorme en tablier qui essuyait un verre crasseux et qui le traîna à une table en s’écriant d’une voix suraigüe :

« B’jour mon aimable jeun’homme. J’vas vous servir deux piintes de bires. »

Ecarquillant les yeux, le psychologue s’apprêtait à refuser lorsqu’il remarqua que la dame s’était déjà enfuie… Il fixa son supérieur avec des yeux de chaton battu, criant à l’aide avec des yeux paniqués… Il murmura, de peur d'être entendu par une de ces étranges silhouettes encapuchonnées :

« Où est-ce que je nous ai emmenés ? »

Spoiler:

Mael avait d’abord été surpris de se trouver nez à nez avec le psychologue de son lycée, et avait mit un certain temps à réagir. Mais il avait vite reprit de l’assurance, retrouvant par la même occasion son sourire qu’il avait perdu plus tôt dans la journée, avant de repartir. Sa phrase question n’était que superflue, puisqu’il connaissait la réponse. Quoique, ça aurait pu très bien être non aussi. Enfin bref. Avant de bouger pour sortir du wagon et ainsi dégager le chemin, il avait répondu, toujours en souriant :

Le coin je sais pas, je viens d’un peu plus loin. Mais ça m’a l’air assez reculé comme endroit...

Une fois dehors, il avait attendu que le psychologue le rejoigne, adossé à un mur un peu plus loin. Il lui avait alors proposé de rester ensemble en attendant que le train reparte. Heureusement, son employé répondit positivement, et ils s’éloignèrent ensemble du quai. Il avait un peu tiqué sur la fin de la phrase, mais ne laissa rien paraître. Charmante compagnie, hein. Cette phrase ne semblait pas ironique, mais pas anodine non plus. Le directeur le dévisagea un peu mais ne commenta pas, et le suivi en acquiesçant. Il préféra ne pas s’attarder sur ce détail, qui peut être ne signifiait tout simplement rien.

En sortant de la gare, ils se retrouvèrent dans un trou paumé tel que Mael ne l’avait jamais vu, à part dans des films. Un village pas très grand, une grande place devant eux. Et surtout, personne dans les rues, à part les voyageurs qui comme eux avaient quitté le train et comptaient visiter un peu avant qu’il reparte. Mael s’arrêta quelques instants pour regarder, assez stupéfait. En fait, cette gare ne devait même pas servir en temps normal : qui voudraient descendre ici ?

Brisant le silence, Rei proposa alors d’aller se poser dans un café en attendant. Mael accepta avec plaisir. Apparemment, c’est tout ce qu’ils allaient pouvoir faire en ces lieux.

Pourquoi pas ! Maintenant, faut le trouver, ce café ...

Ils repartirent, et n’eurent pas à marcher bien longtemps avant de trouver un bar. Mais celui-ci n’avait pas tellement belle allure, et ne donnait pas tellement envie d’y aller. Mael s’apprêtait à continuer son chemin, sans faire attention plus que ça au bar, mais le psychologue ne semblait pas de cet avis. Enfin presque. L’aspect miteux de ce lieu ne lui était pas passé à côté, mais il proposa quand même d’y aller, au cas où. Un bref regard de Mael aux alentours et un peu plus loin lui indiqua que de toute façon, il ne semblait pas y avoir grand-chose d’autre. Du coup, c’est pas comme s’ils avaient le choix...

Ne cachant pas son scepticisme, Mael accepta sa proposition.

Y’a qu’à ... On verra bien !

Il resta néanmoins légèrement en arrière, et entra à la suite du psychologue. Aussitôt, il sut qu’ils n’auraient pas du entrer ici. Mais pour l’instant, son accompagnateur semblait déterminé, alors suivons... Restant un peu en retrait, il observait les lieux, de plus en plus inquiet quant au service, et l’hygiène de cet établissement. Le psy se retourna alors, et commença une phrase qu’il n’eut pas le temps de terminer, interrompu par une serveuse qui se rapprochait dangereusement d’eux. De toute façon, au vu de son expression, il n’en avait pas fallu plus à Mael pour comprendre ce qu’il avait voulu lui dire, et était totalement d’accord.

Trop tard, la bonne femme n’avait même pas attendu qu’ils disent un mot et leur proposait d’emblée qu’elle leur servirait « deux bires ». En l’observant, ainsi que le verre qu’elle tenait dans la main, les doutes de Mael sur l’hygiène ici s’agrandirent. Non vraiment, ils ne pouvaient pas rester là. La seule chose qui fit sourire le directeur, ce fut le regarde apitoyé que lui lança Hanamomo-san. Comme un chien qui regarde son maître après avoir fait une connerie et qui a peur qu’il lui en veuille. Assez marrant. Il lui murmura alors quelques mots, sans doute pour ne pas être entendu par les gens aux alentours. Un léger sourire amusé sur les lèvres, Mael répondit sur le même ton que lui :

Je sais pas, mais profitons qu’elle soit partie pour déguerpir.

Sur ce, il n’attendit même pas sa réponse. Sait-on jamais, l’autre pouvait revenir avec les deux « pintes de bire », et là ils seraient forcés de rester. Au moins s’ils disparaissaient, ça ne ferait juste deux verres de gaspillés.
Une fois dehors, il soupira bruyamment, avec un grand sourire, avant de reprendre d’un air amusé :

Au moins, ça vous apprendra à vous méfier un peu plus.

Nouveaux regards autour de lui, bien que le décors n’avait pas changé depuis tout à l’heure, il continua :

Je suggère qu’on continue un peu plus, et au pire, on se posera dans un coin et on attendra, sans café. ^^°

Les deux jeunes hommes s’étaient donc retrouvés coincés dans un café sordide et Rei n’avait pu s’empêcher de jeter un coup d’œil coupable à son supérieur avant de lui murmurer quelques vagues excuses et interrogations auquel celui-ci répondit :

Je sais pas, mais profitons qu’elle soit partie pour déguerpir.

Et il avait raison ! Le directeur commença donc à s’enfuir, le psychologue sur ses talons, avant que la sorcière ne revienne et une fois en dehors de l’établissement, le directeur soupira avant de paraître malicieusement amusé :

Au moins, ça vous apprendra à vous méfier un peu plus.

Rougissant légèrement, Rei fixa le sol. Il se trouvait minable. C’était vrai qu’il n’avait plus tellement l’habitude des entourloupes et de se faire avoir de la sorte alors il ne se méfiait plus ce qui pouvait lui apporter des ennuis comme dans ce cas-là. Mais il fallait avouer que c’était plus que gênant que ce soit son supérieur hiérarchique qui s’en rende compte et surtout de cette manière-là. Il devait passer pour un imbécile, maintenant. Alors inutile de continuer à faire le dragueur parce que là, il passerait vraiment pour le dernier des crétins.
Le psychologue décida d’arrêter de jouer avec Mael, jugeant cela trop dangereux et écouta calmement celui-ci proposer :

Je suggère qu’on continue un peu plus, et au pire, on se posera dans un coin et on attendra, sans café. ^^°

C’est alors que le psychologue, d’humeur gaffeuse, se mit à lâcher sans pouvoir contrôler quoi que ce soit :

« Moui… Mais à votre place, j’éviterai de me faire confiance pour l’itinéraire de la promenade car je n’ai aucun sens de l’orientation ! »

Se rendant alors compte de ce qu’il disait, le jeune homme à l’égo surdimensionné se sentit devenir carmin. Il essaya de contrôler son embarras en évitant de fixer le directeur et en concentrant son attention sur un petit caillou, devant ses chaussures, qui devint subitement véritablement passionnant et en remontant lentement ses lunettes sur son nez. Pour finir, il toussota :

« Eh bien… Je crois que je suis un peu fatigué par ma mâtinée, moi… »

Ne voulant pas s’attarder sur ça, il enchaîna :

« Pour le café, je ne pense pas que cela soit si grave, il fait plutôt bon aujourd’hui. Vous rendiez visite à de la famille ? »

Un sourire mi-piteux, mi-éblouissant prit place sur le visage du jeune psychologue tandis qu’il essayait de rediriger la conversation pour éviter de rester sur son embarras plutôt stupide…

[Oula… Je n’étais pas très en forme pour cette réponse, j’essayerai de me rattraper à la prochaine !]

Son bref regard aux alentours ne lui indiqua rien de plus qu’en arrivant, évidemment. Lorsque son regard retourna se poser sur le psychologue, le directeur ne put s’empêcher de sourire un peu. En effet, le psy était à présent tête baissée, visiblement honteux. Et pourtant, Mael ne lui en voulait pas pour cette aventure, qui en soit était plus comique que fâcheuse. Il ne regrettait pas d’avoir tenté un approche dans ce bar des plus étranges, ni ne lui en voulait pour l’y avoir emmené. Et Rei semblait pourtant croire le contraire. Toujours souriant, Mael ignora son comportement, tout de même amusé, et enchaîna avec sa proposition.

La réponse du psy le fit sourire. Lui non plus n’avait pas un très bon sens de l’orientation. Dans un élan de flemmardise, Mael n’avait plus tellement envie de bouger, au final. Et puis si c’était pour se perdre, et louper le train, qui de plus était le dernier de la journée, non merci. Où dormiraient-ils, en plus ? Avisant un banc non loin, le directeur le désigna d’un léger mouvement de la tête, et lança :

Allons nous asseoir en attendant, alors.

Sans plus attendre, il commença à se diriger vers le banc, situé à un dizaine de mètres d’eux, marchant aux côtés du psy. Celui-ci lui posa alors la question à laquelle il aurait préféré ne pas avoir à répondre. En effet, il allait voir de la famille, mais ce n’était pas pour le rendre de bonne humeur. Il laissa un blanc, le temps de réfléchir à ce qu’il allait répondre, puis, sans le regarder, répondit simplement, sans donner plus de détails que nécessaire :

En effet. Et vous, que faisiez vous dans le coin ?

Ils arrivèrent au niveau du banc, et Mael prit place au bord de celui-ci. Son regard alla se poser sur un oiseau qui, un peu plus loin au bord d’un autre banc, parcourait le sol à la recherche de quelques miettes ou autres résidus d’un précédent repas.

Le directeur désigna un banc un peu plus loin devant eux. Le psychologue le suivit calmement avant de s’asseoir à ses côtés tout en le questionnant un peu sur la nature de son arrivée dans le train. Il y eut un léger silence pendant lequel le psychologue ne pu s’empêcher d’observer le directeur à la recherche d’un signe qu’il pourrait analyser. Cependant, monsieur Fujiwara se contenta simplement de répondre :

En effet. Et vous, que faisiez vous dans le coin ?

Cette réponse intrigua Rei. Il la trouva vague et trouva que le temps de réponse avait été trop long, comme si le directeur avait mûrement réfléchi avant de donner cette réponse plutôt vague. Le jeune homme aux longs cheveux bruns, qui était de nature plutôt curieuse se demanda s’il n’avait pas un souci avec sa famille ou s’il n’était pas en train de lui mentir. Peut-être ne voulait-il pas avouer qu’il était allé voir une petite amie ?
Répondant sans réfléchir et immédiatement, il dit d’une mine joyeuse :

« Pour ma part, je suis allé visiter le coin. Une petite randonnée en montagne n’a jamais fait de mal à qui que ce soit, n’est-ce-pas ? Et puis… Maintenant que je suis au Japon, je peux bien en profiter pour visiter un peu le coin. »

Il s’arrêta un instant pour continuer :

« Vous avez une histoire si riche et tellement passionnante qu’il y a énormément de choses à voir. Si bien que je ne sais pas vraiment par quoi commencer. »

Regardant lui aussi l’oiseau qui se baladait près d’un autre banc vide, il resta silencieux. Fixant avec un air parfaitement stoïque un point devant lui, il resta ainsi pendant quelques minutes sans laisser ne serait-ce l’ombre d’une émotion passer sur son visage. Il semblait totalement déconnecté du monde réel si bien qu’il cligna plusieurs fois des yeux, comme s’il venait de se réveiller, pour enfin reporter son attention sur le directeur :

« J’ai une question à vous poser. Pensez-vous que les psychologues servent à quelque chose ? »

Se reprenant, il fit un petit sourire gêné afin d’expliquer sa question :

« Je veux dire par là que les élèves, de nos jours, ont vraiment du mal à se confier à moi. On pourrait croire à une sorte de corvée. Mais ce n’est pas tout. Même les hommes eux même ont du mal à se confier. »

Remontant ses lunettes pour enfin tortiller ses cheveux autour d’un doigt, il continua son raisonnement :

« Peut-être que c’est simplement par amour propre mais c’est totalement stupide. Pourquoi laisser le mal nous ronger quand on peut se faire aider ? Je fais ce métier afin d’aider les gens, je veux les aider à faire disparaître ce mal qui les rongent avant que ça ne soit trop tard… »

Il soupira en haussant les épaules :

« Je suis censé aider les adolescents de cet établissement mais je peux aussi soulager les adultes. J’aimerais aider le plus de personnes possibles et pourtant, ceux qui ont le plus besoin de mon aide la refuse… »

Peut-être visait-il personnellement le directeur car il avait bien entendu que son père, l’ancien directeur, était atteint de cancer. De plus, il paraissait si sérieux et si calme que Rei ne se demandait pas si tout cela n’était qu’une couverture afin de cacher une grande souffrance. Toutefois, il ne se permit aucune allusion, ne voulant pas froisser le bel homme qui était à ses côtés. Il avait bien compris que cette personne était plutôt le genre de personne à prendre avec des pincettes et choisissait soigneusement ses mots afin d’éviter que le courroux divin ne s’abattent sur sa pauvre tête de petit mortel sans défense…

Les yeux rivés sur le petit oiseau qui se régalait non loin des deux hommes, la voix du psychologue retint l’attention de Mael qui détourna le regard pour le poser sur son interlocuteur. Balade en Montagne. En effet, ce devait être sympathique, dans le coin. Les paysages sont beaux, loin de toute pollution des grandes villes. Mael n’était pas très fan de la marche, n’ayant eu l’occasion d’en faire que lorsqu’il en était forcé avec ses parents.

Le temps du court silence qui s’imposa, Mael se contenta de hocher la tête en signe d’acquiescement, et le laissa continuer de parler. Il lui fallu quelques secondes pour capter que Rei parlait du Japon en général, ce qui lui valu une expression quelque peu intriguée avant, puis un léger sourire au moment de la compréhension. Ne sachant pas vraiment quoi répondre, et n’ayant rien à y rédire, il se contenta tout de même d’un vague « mhh... » tout juste audible.

Les minutes s’écoulèrent ensuite sans que le son de leur voix ne vienne perturber le bruit de la nature autour d’eux. Les oiseaux faisaient leurs vocalises, tandis qu’on entendait légèrement le bruit d’un petit ruisseau qui devait passer non loin d’ici. Le directeur pourra un long soupir, puis se pencha en arrière, s’affalant ainsi sur le banc, la tête en arrière et le regard vers le ciel. Ses yeux se mirent à fixer les quelques nuages qui trainaient dans un ciel de plus en plus sombre, son esprit alla se perdre au milieu de ces nuages. Il était comme déconnecté momentanément de la réalité, n’ayant plus aucune notion de temps ni de lieu. Si bien que lorsque le psy reprit la parole, il sursauta légèrement et se redressa pour fixer l’homme à côté de lui. Il fut également surprit par la question qu’il lui posait. S’il pensait que les psychologues sont utiles ou non. Il n’eut pas le temps de répondre que déjà, Hanamomo-san reprenait la parole, expliquant ainsi sa question.

Laissant s’écouler quelques secondes après la fin de la tirade, il répondit alors à la question du psy :

Ça ... On ne peut pas non plus obliger les gens à aller vous voir, même si cela leur était utile ...

Il poussa un autre soupir, puis jeta un regard à sa montre. Une bonne demi heure était passée, mais il restait encore une heure à occuper. Ils ne pouvaient pas faire grand-chose au final. S’ils bougeaient, ils ne pouvaient pas aller loin pour avoir le temps de revenir. Dans le coin, il n’y avait rien. Et rester ici à rien faire, à part discuter, ce n’était pas top non plus... N’ayant aucune idée de rester planter là, mais rien à proposer, il finit par demander son avis au psy :

Il reste une bonne heure à occuper d’ici le départ du train. Vous avez une idée ?

Le directeur avait patiemment écouté ce qu’avait à dire le psychologue avant de renchérir :

Ça ... On ne peut pas non plus obliger les gens à aller vous voir, même si cela leur était utile ...

Rei voulu lui répondre qu’il ne comptait pas forcer les autres à venir le voir puisqu’on devait être tout à fait consentant et prêt à se faire aider pour aller le voir. Il voulait juste que les autres acceptent l’idée qu’il puisse les aider mais avant qu’il ne puisse ouvrir la bouche son compagnon de galère regarda sa montre avant d’annoncer :

Il reste une bonne heure à occuper d’ici le départ du train. Vous avez une idée ?

Le jeune homme aux longs cheveux noirs se contenta tout d’abord de garder le silence, réfléchissant sérieusement à la question puis il ouvrit la bouche dans le but de donner son avis :

« Eh bien, nous pourrions… »
« MAMAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !!! »

Avant de pouvoir terminer sa phrase, un petit garçon qui devait avoir cinq ans, peut-être six venait de se jeter sur lui en pleurant. Ouvrant de grands yeux, il se contenta de lâcher un minable :

« Euh…Non, pas vraiment, non… »

Avant de voir le petit garçon brun relever le regard pour se rendre compte de son erreur et laissant redoubler ses larmes :

« T’es pas ma mamaaaan, j’ai perdu ma mamaaan !!! »

N’étant pas franchement doué avec les enfants, il essaya de masquer cet handicape en prenant une mine attendri et en le regardant avec attention tandis que le morveux continuait :

« Aide-moi à retrouver ma maman, madame. »

Ce n’était même pas une question mais un ordre et avant que Rei n’ait pu ouvrir la bouche, le petit garçon s’était déjà emparé de sa main et l’emmenait de ses petites forces. Haussant des épaules, il se retourna vers le directeur en lâchant :

« Bah…Euh… A tout à l’heure ? »

Jusqu’à ce que le petit garçon décide :

« Non mais si je perds ma maman, tu vas la remplacer et lui, ça sera mon papa ! Voilà ! »

Ecarquillant les yeux, le psychologue se demanda vaguement s’ils étaient tous fous dans ce village avant d’essayer de faire comprendre au garçon qu’il n’était pas ni une madame, ni une maman mais c’était peine perdue parce que le garçon ne l’écoutait pas et continuait son chemin. Ils s’élancèrent donc dans la direction opposée de la gare et commencèrent à prendre des petits chemins. Essayant de tout mémoriser, le jeune homme androgyne savait que c’était peine perdue et qu’il ne se rappellerait jamais du chemin pour retrouver la gare. Il s’arrêta alors brusquement en retirant sa main pour s’accroupir en se mettant à la hauteur du garçon pour lui demander :

« Bon… Il va falloir que tu nous expliques ce qu’il s’est passé pour que nous retrouvions ta maman… »

Peine perdue, le petit garçon se mit à pleurer et hurla :

« Tu veux pas être ma maman, c’est ça ? Pourquoi personne ne veut de moi ? »

Paniquant à moitié, il essaya de garder son sang-froid en vain :

« Beh…Non, ce n’est pas que je ne veux pas être ta maman mais… Hey, je ne suis pas une maman !? Euh… Non, pleure pas, je veux bien être ta maman mais pleure pas ! Il faut tout de même trouver ta vraie maman, non ? Bon… Comment tu t’appelles ? »

Le garçon répondit en hoquetant :

« A…Akemi… »
« Bon Akemi, tu vas faire plaisir à…M…Ma…Mam…Non, je ne peux vraiment pas le diiiire ! Euh… Tu vas faire plaisir à Papa et lui raconter ce qu’il s’est passé, d’accord ? Et d’abord, pourquoi c’est lui le papa ? »
« Bah parce que la maman, c’est une femme et le papa, c’est un homme. Et toi, t’es une jolie femme donc t’es maman. »
« Je ne sais pas comment je dois le prendre… »

Le psychologue fit une moue dépitée avant de continuer :

« Bon, raconte-moi et raconte à papa ce qu’il s’est passé ! »

Le garçon essaya de s’empêcher de pleurer pour raconter de manière compréhensible son histoire :

« Bah, en fait… J’étais avec maman dans ce coin et on se baladait dans la forêt là-bas, en fait… Et on cueillait des champignons mais je suis allé dans un coin avec pleins de champignons et je me suis perdu et j’ai retrouvé le chemin pour retourner en ville mais maman est coincée dans la forêt, si ça se trouve, elle s’est perdue… Elle va se faire manger par des monstres alors il faut que je trouve une nouvelle maman !!! »

Essayant de garder une mine stoïque, le jeune homme n’en pensait pas moins et il se releva en jetant un regard au directeur, essayant de ne pas faire attention à sa mine hilare pour lâcher :

« Qu’est-ce que vous en pensez ? Personnellement, je pense qu’on devrait rester à l’entrée de la forêt ou essayer de trouver ta maison… Ta maman a peut-être un numéro de portable afin de la joindre ? Mais vous avez peut-être une idée, monsieur Fujiwara ? »

Le jeune directeur fixait son interlocuteur, en attente de la réponse à laquelle il venait de poser, lorsqu’un gamin plutôt jeune accourut vers eux, interrompant par la même occasion le psychologue. Mael eut un soupir agacé en regardant le gosse approcher. Les gosses ... Il n’aimait pas vraiment ça. C’est une chose qui ne fait que brailler et faire des caprices. Pas reposant du tout.

Le gosse, qui venait alors de crier un « mamaaaaan » en courant vers eux, ne fut que surprit en se rendant compte que ce n’était pas elle. Cependant, il continuait de voir une femme au travers du psy. Bon certes, il avait quand même un visage très efféminé, mais sa voix ne trompait pas. Comment pouvait-il rester persuadé qu’il s’agissait d’une femme ? Et puis collant le gosse aussi. Mael, qui s’était contenté d’observer la scène en restant silencieux, commençait finalement à trouver la situation assez drôle. La façon dont le psy se débrouillait, tant bien que mal, ainsi que l’obstination du gamin à vouloir faire des deux hommes ses parents. Le directeur ne se contenta que de les suivre lorsque le môme les entraîna, tirant Rei par la main en direction opposée de la gare.

Il écouta attentivement les explications d’Akemi, puis reporta son regard vers le psy, et réponut avec un grand sourire presque moqueur aux lèvres qu’il ne pouvait contenir :

Il serait préférable d’opter pour l’option chercher la maison... non ?

Se tournant vers le gamin, il ajouta :

Tu peux nous emmener à ta maison ? On va attendre ta maman là bas, d’accord ?

Nan, ma maman maintenant c’est elle ! J’veux rester avec vous !

Ecoute. Si tu nous emmènes pas à ta maison, on te laisse tout seul ici et tu te débrouilles pour trouver ta maman.

Le directeur avait fini par prendre un ton un peu plus dur, commençant à en avoir marre des caprices du gosse. Et puis merde, ils n’étaient pas ses parents ! Il commençait à maudire la mère qui n’avait pas du rester sur ses gardes et surveiller correctement son gamin. Maintenant c’est eux qui l’avaient dans les pattes, et ils ne pouvaient pas le laisser seul comme ça.

Heureusement, le gamin finit par coopérer et il les emmena dans la même direction qu’il avait commencé à prendre, avant de commencer à hésiter. Après les avoir baladés pendant un bon moment, ils finirent par s’arrêter devant une maison dans le même état que toutes les autres autour. Lorsque le directeur alla pour actionner la poignée de la porte, celle-ci était évidemment fermée à clé. Il poussa un soupir, puis regarda autour. Pas de maman autour. Et merde. Ils allaient devoir patienter avec un gosse dans les pattes. Quelque peu douteux d’être au bon endroit, Mael questionna une nouvelle fois l’enfant :

Tu es sûr que c’est ici ?

Ou, c’est ma maison ! Mais j’ai pas les clés é_è

Bon ben, on va attendre ta maman alors ...

Il se tourna ensuite vers le psy, puis continua :

De toute façon c’est pas comme si on avait le choix ...

Ils attendirent ainsi durant un boon moment, avant que n’arrive la mère, surprise de retrouver son gamin devant chez elle, mais heureuse de l’avoir retrouvé. Elle remercia d ‘ailleurs énormément les deux hommes, et leur proposa de rester boire un verre en guise de reconnaissance. Mael regarda le psy, et lui lança un regard interrogateur. Lui n’était pas contre, il avait toujours cette petite soif qu’ils n’avaient pas pu combler un peu auparavant. Après, reste à savoir si son collègue était d’accord.

Le directeur décida de prendre les choses en main et il proposa de chercher la maison du jeune garçon. C’était, en effet, la meilleure solution car la mère aurait le réflexe de rentrer chez elle dans un élan de désespoir avant d’ameuter tout le monde pour partir à la recherche de sa progéniture. Pas besoin de faire de l’étude de comportementalisme pour savoir qu’une mère perdant son enfant devenait un peu comme une mère sauvage et que ses agissements devenaient alors tout à fait prévisibles, car dictés par l’instinct. Ils demandèrent donc au jeune garçon de leur indiquer le chemin de sa maison et celui-ci refusa, tout d’abord. Rei allait se baisser pour lui parler gentiment, essayant de négocier avec lui, mais le directeur fut plus rapide et il fit preuve d’autorité afin de mettre fin au caprice de l’enfant qui finit par obéir docilement.

Un petit sourire amer étirait les lèvres du psychologue lorsqu’il se rendit compte de la situation car, dans un couple, on considérait toujours la mère comme la personne maternelle, toujours à bichonner et à rester patiente avec sa progéniture, comme il le faisait. Contrairement au père, plus stricte, qui était là pour imposer de les règles. Il comprit alors tout de suite, pourquoi le jeune garçon avait choisit ces rôles-là. Il l’avait senti instinctivement. Et alors que tout cela n’était qu’une sombre mascarade, le psychologue ne pouvait s’empêcher de se sentir vexé par cette révélation. Peut-être que son égo en avait prit un sacré coup. Son égo masculin, son côté virile. Car même si le jeune homme était très féminin, il assumait totalement son côté masculin et il savait que la femme et l’homme qui étaient en lui prenaient autant de place l’un que l’autre. C’était certainement pour cela qu’il était bisexuel, d’ailleurs…

Et les chemins sinueux qui s’enfonçaient de plus en plus dans la ville pour se rapprocher dangereusement de la forêt commençaient à se multiplier pour finalement les déposer devant une coquette villa au milieu de ses jumelles. Monsieur Fujiwara questionna l’enfant alors que la réponse semblait plutôt évidente : ils étaient arrivés. Aucune maman en vue, ils attendirent un bon moment avant d’apercevoir une mère désespérée s’amener vers eux qui prit l’enfant dans ses bras, manquant de pleurer tellement elle se sentait soulagée de le retrouver. Elle avait l’air d’être une femme débordée par son enfant et plutôt maladroite, le genre de femme qui attire immédiatement la sympathie. Naturellement, Rei se mit à sourire avec une mine attendrie en l’écoutant s’excuser puis leur proposer de venir boire un verre.
Le directeur se tourna alors vers lui pour lui demander son avis. Il ne semblait pas être contre l’invitation de la jeune femme et le psychologue jeta un coup d’œil à son poignet pour se rendre compte qu’il n’avait pas l’heure sur lui. Il haussa simplement les épaules avant de faire un grand sourire charmeur à la mère en lui disant :

« Eh bien… C’est avec joie que nous accepterons votre invitation, madame… ? »

Avec un sourire presque séduit, elle lui tendit la main en se présentant :

« Madame Katzukai. Enchantée. Et merci encore, messieurs, vous me sauvez la vie. »

Ils discutèrent donc avec la jeune femme qui se trouvait être une personne extrêmement intéressante. Elle travaillait dans le milieu de la recherche, d’où son air toujours débordé et systématiquement dans la lune. Elle était mère célibataire et avait voulu passer du bon temps avec son fils parce qu’elle n’avait habituellement pas le temps de s’occuper de lui mais elle s’était perdu dans ses pensées durant sa cueillette si bien qu’elle n’avait pas fait attention à son fils. Rei décida de ne pas lui faire la morale, cela ne servait à rien, elle avait retenu la leçon et il discuta de bon cœur avec elle jusqu’à ce qu’il se tourne vers son supérieur en lui déclarant :

« Oh… Nous… Nous devrions peut-être y aller, non ? Le temps de retrouver notre chemin, il sera certainement l’heure de reprendre le train. »

Aussitôt dit, aussitôt fait, ils prirent congé de la mère et du petit Akemi avant de regarder autour d’eux. A gauche ou à droite ? Instinctivement, ils se dirigèrent vers la droite sans même prendre le temps de se consulter. Ils semblaient être d’accord sur la direction mais le psychologue avait comme un mauvais pressentiment. Et lorsqu’ils arrivèrent à la lisière de la forêt et qu’il sentit la première goutte de pluie tomber sur lui, ses doutes se confirmèrent. Ils étaient perdus. Et comme si cela ne suffisait pas, la nuit commençait à tomber peu à peu tandis qu’une belle tempête se préparait. Dans quelques minutes, ils seraient sous un véritable déluge et ils ne savaient pas du tout où se trouvait la gare.
Se tournant vers le beau directeur, Rei se mordit la lèvre en prenant un air désolé, tout en déclarant timidement :

« Monsieur Fujiwara ? Je pense que nous devrions trouver un abri pour la nuit… Cela ne sert à rien de s’acharner à chercher la gare. A l’heure qu’il est, même en courant, on ne pourrait jamais avoir notre train. De plus, il va se mettre à pleuvoir dans pas longtemps… J’opterai pour que l’on aille se protéger sous les arbres. Cela m’étonnerait qu’un villageois accepte de nous héberger… Qu’en pensez-vous ? »

La pluie commençait à s’affirmer de plus en plus et bientôt, ils seraient trempés. Rei leva la tête et se servit de sa main comme visière tandis qu’il observait le soleil disparaître petit à petit, englouti par la masse noirâtre que formait la forêt.

Après un échange bref de regard, le psychologue prit la parole et accepta la proposition de la femme, ce qui fit plaisir au directeur. Celui-ci commençait à avoir soif, et se poser un peu lui ferait du bien. Ils se retrouvèrent installés confortablement dans un grand canapé, les boissons sur la table basse devant eux. S’ensuivit une discussion intéressante, durant laquelle ils ne virent pas l’heure passer. Jusqu’à ce que Rei l‘interrompit, faisant remarquer qu’ils devaient y aller s’ils ne voulaient pas louper leur train. Le directeur acquiesça, jetant un coup d’œil sur sa montre. En effet, cela faisait déjà plus d’une heure qu’ils avaient quitté le train. Presque une heure et demie. Il ne restait plus qu’à espérer que celui-ci ne soit pas déjà parti, sans quoi ils étaient bons pour passer la nuit ici.

Les au-revoir furent rapides, bien que le petit fut un peu triste de les voir partir. Une fois dehors, ils prirent une direction un peu au hasard, espérant bien que ce soit la bonne. Après un moment de marche, ils se retrouvèrent bel et bien perdus, tandis que pour empirer le tout, la pluie commençait à tomber. Le ciel très sombre ne présageait rien de bon, et c’est plus un déluge qu’autre chose qu’ils allaient se prendre s’ils ne bougeaient pas d’ici. Il fallait trouver une solution, et vite. Rei fit alors sa proposition, et après un court instant de réflexion, Mael accepta, ne voyant de toute façon pas d’autre solution.

Ils se dirigèrent vers la forêt, où les arbres prodiguaient pour l’instant un bon abri. Tant qu’il ne pleuvait pas des cordes, la pluie ne filtrait pas à travers les feuilles, et ils restaient au sec. Il leur faudrait cependant trouver un abri quand même, celui que leur procurait les arbres leur permettait d’avoir un peu plus de temps pour chercher, sans être trempés. Ils devraient bien trouver une cabane de chasseur, il y en avait toujours dans les forêts comme ça. Ou pas ...

C’est seulement après un bon moment de marche qu’ils tombèrent sur une petit cabane, dans un état encore plutôt bon. Mael sourit en l’apercevant, et fit part de sa découverte à son collègue avec un grand sourire.

Arrêtons nous là, nous y serons au sec. Il va bientôt faire nuit ... Je crois qu’on est bon pour y rester jusqu’à demain. Cela vous pose un problème ?

Sans vraiment attendre de réponse, il s’avança vers la construction en espérant que ce ne soit pas fermé. Heureusement, ce n’était pas le cas, et ils purent entrer sans difficulté. A l’intérieur, ce n’était pas bien grand. Il y avait un vieux canapé tout abîmé, ayant du servir des années avant d’atterrir ici, et une table tout aussi vieille un peu plus loin. Dans un coin se trouvait un placard que Mael s’empressa d’aller ouvrir. Malheureusement, il était totalement vide, mis à part un cadavre de souris assez récent, ce qui lui extirpa une grimace de dégout avant de refermer la porte du placard. Il se releva et fit face au psychologue, la mine abattue.

Il n’y a rien ici... Désolé...

Détournant le regard, il pivota sur sa gauche et se dirigea vers le canapé, avant de s’y affaler, laissant entendre un grincement à moment là. Oh ! Un canapé bruyant, chouette ...

Le directeur sembla accepter la proposition de Rei et ils commencèrent à aller dans la forêt. Ils avaient de la chance, les feuilles d’arbre semblaient ralentir la pluie et ils se trouvaient être à l’abri sous les arbres. Heureusement, également, pour eux qu’il n’y avait pas d’orage sinon, ils auraient vraiment eu de sacrés problèmes et le psychologue ne savait pas comment ils s’en seraient sortis. Enfin bon, ils semblaient tout de même avoir un peu de chance dans leur malheur et lorsqu’ils suivirent un joli petit chemin, qui avait été tracé il y a un bon bout de temps par un homme, ils arrivèrent devant une petite cabane abandonnée. Avec un joli sourire, monsieur Fujiwara se tourna vers son collègue pour lui dire :

Arrêtons nous là, nous y serons au sec. Il va bientôt faire nuit ... Je crois qu’on est bon pour y rester jusqu’à demain. Cela vous pose un problème ?

Le jeune homme aux longs cheveux noirs répondit que non, cela ne le dérangeait absolument pas avant qu’ils essayent d’ouvrir la porte. La cabane n’était pas fermée. Une nouvelle chance pour eux. Ils entrèrent donc. Bon… Bien sûr, il ne fallait pas s’attendre à du quatre étoiles et la cabane contenait le strict minimum : un vieux canapé tout troué, une vieille table, un petit placard au bois qui commençait à pourrir et quelques gouttes d’eau s’infiltraient par le toit pour mouiller le sol. Il ne faisait pas très chaud, il fallait l’avouer et Rei comprit qu’ils allaient passer une nuit très longue et très difficile. Il ne pu s’empêcher de lâcher un demi-soupir, restant dans l’encadrement de la porte pendant que le directeur partait fureter partout à la recherche d’aliments. Il revint en déclarant piteusement :

Il n’y a rien ici... Désolé...

Empêchant une moue déçue de s’afficher sur son visage, il resta silencieux en regardant monsieur Fujiwara se laisser tomber sur le canapé qui laissa échapper un long grincement particulièrement désagréable. Oui, il ne fallait pas s’attendre à ce que tout soit parfait et ils pouvaient s’estimer déjà heureux pour la chance qu’ils avaient eue à ce niveau-là. Il fallait rester optimiste.
Mais le ventre du psychologue en décida autrement en laissant échapper un long râle qui le fit rougir de honte. Bah c’était du beau. Il se mettait à faire du concert devant son supérieur. Bon… C’était déjà quelque chose de honteux en soi mais il fallait aussi préciser que le directeur en question était une superbe créature qui le fixait maintenant avec un regard hilare. Vraiment…Vraiment…Vraiment pas de chance. Il n’en pouvait plus. Si bien qu’il déclara :

« J’ai vu une épicerie pas loin d’ici. Je vais essayer d’aller nous acheter à manger. Il y a quelque chose que vous détestez en particulier ? »

Rei nota mentalement la réponse de son supérieur avant de lui dire, en partant :

« Je pense être de retour dans trente minutes. »

Il referma la porte pour refaire le chemin opposé avant d’arriver dans le village. Bon…Il fallait juste qu’il retrouve l’épicerie en question, maintenant. La pluie était vraiment devenue effrayante et elle tombait si fort sur le sol chaud qu’on pouvait voir de la fumée s’échapper de celui-ci. De plus, elle était tellement forte qu’on ne voyait plus rien à plus de deux mètres. Ça allait être pratique, tiens…

Au bout de quelques secondes, le psychologue se retrouva être complètement trempés. Ses converses faisaient un affreux bruit de succion à chaque pas et ses vêtements lui collaient à la peau, devenus lourds. C’était vraiment horrible et il regrettait de ne pas avoir prit de parapluie mais le temps était tellement splendide le matin même qu’il n’avait pas pensé une seconde que cela finirait ainsi.
Il tourna un bon bout de temps dans le village sous le regard empli de pitié des rares passants bien protégés par leur parapluie mais aucun d’entre eux ne prit la peine de lui porter secours. Non, non, non. Ils étaient bien trop égocentriques pour que ça leur effleure l’esprit. Et après c’était le psychologue qui était considéré comme un monstre ? Bande d’imbéciles. Crevez tous. Il fallait avouer que le jeune homme se sentait particulièrement en colère jusqu’à ce qu’un parapluie se dresse au-dessus de sa tête. Surpris, il tourna la tête pour voir une demoiselle de la vingtaine au physique plutôt banale mais avec un sourire niais empli de pure générosité qui le fixait avant de lui demander où il comptait aller comme ça.

Le psychologue n’aimait pas non plus les filles de ce genre-là. C’était des petites idiotes ingénues et vraiment trop naïves qui se laissaient facilement marcher sur les pieds et, qui n’avaient aucune personnalité. Elles étaient toujours en train de se plaindre dans son cabinet, ne comprenant pas pourquoi tout le monde était méchant avec elles. C’était juste… Trop pathétique. Il fallait avouer qu’il faisait aussi parti de ceux qui profitaient d’elles. Et il en était fier. Mais celle-ci tombait à pic. Il lui sorti alors son petit sourire en coin charmeur et la remercia chaudement de lui porter secours en lui expliquant la situation.
Apparemment, elle n’avait rien de plus à faire car elle lui proposa de l’aider et l’amena à l’épicerie en question où il pu acheter des provisions avant de l’emmener dans une espèce de Bazar qui vendait un peu de tout où il pu s’acheter un kimono bleu ciel pour homme, expliquant en riant à la demoiselle qu’il espérait faire revenir le beau temps en prenant cette couleur avant de prendre des couvertures bien chaudes, un petit futon transportable et une serviette pour se sécher. Le vendeur eut pitié de l’état relativement lamentable de Rei et il lui fit un beau prix et c’est donc tout content qu’il revint à la forêt grâce à la jeune fille qui lui demanda pour la énième fois s’il était sûr qu’elle ne pouvait pas l’héberger pour cette nuit. Il refusa pour la simple et bonne raison qu’il savait qu’elle tenterait certainement quelque chose durant la nuit et que ce genre de filles était particulièrement collant. De plus, il avait fait ses achats alors autant que cela serve à quelque chose.

Le jeune homme aux longs cheveux de jais reprit donc pour la troisième fois le petit chemin avant d’arriver enfin à la cabane. Il entra en s’ébrouant sur le paillasson avant de rapporter avec un petit air victorieux ses provisions qu’il posa sur le côté avant de s’expliquer :

« J’ai trouvé des provisions mais j’ai également pris des couvertures car la nuit risque d’être particulièrement fraîche. »

Il avait pris environ une heure trente mais n'avait pas eu la notion du temps vu qu'il n'avait pas de montre. Il prit ses cheveux et les tordit dans l’espoir de les sécher un peu avant d’enlever son tee-shirt, dévoilant la fine musculature de son torse qui rappelait plus celle d’une femme sans poitrine avant de s’excuser :

« Désolé, il faut à tout prix que je me change. Fin bon…Ce n’est pas si grave car nous sommes entre hommes, n’est-ce-pas !? »

Un petit sourire aimable étira les lèvres du psychologue. Il n’était pas sûr que le directeur soir attirés par les hommes. Si ça se trouvé, l’homme était purement et simplement hétérosexuel alors il fallait avouer qu’il le provoquait un peu avec cette phrase mais il se doutait bien qu’il ne tirerait rien du directeur qui semblait être aussi sensible qu’un mur de brique et qui ne se laissait pas le moins du monde impressionner.
Ce genre de choses avait tendance à intriguer le psychologue qui ne savait pas vraiment comment s’y prendre avec ce genre de personnes et il devait sans cesse faire attention à ses agissements. Alors qu’avec les autres, tout coulait de source. Il avait l’impression d’avoir le tact naturellement mais lui… Lui, c’était différent.

Perdu dans ses pensées, il se sécha le haut du corps avant d’enlever machinalement son jean mettant à nu ses longues jambes imberbes et continua l’opération avec le bas de son corps avant d’enfiler le beau kimono bleu ciel qu’il venait d’acheter. Il n’y avait pas à dire, le bleu ciel se mariait à merveille avec ses grands cheveux noirs et ses yeux améthystes. Il entreprit alors de sécher ses cheveux en lâchant, toujours distrait et ne faisant guère attention au directeur :

« C’est un véritable déluge dehors, j’espère bien que cela va se calmer… »

Il noua la serviette de manière à sécher ses cheveux tout en ayant les deux mains libres et sortit ses précieux achats de ses sacs. Comme il n’y avait rien pour réchauffer ou pour cuisiner, il avait du prendre des plats froids. Il sortit alors son thermos de son propre sac afin de proposer du café au directeur s’il en voulait et mis la table : une vraie femme au foyer...

Affalé sur le canapé, Mael regardait le plafond d’un air pensif, lorsqu’un long gargouillis retint son attention. Il se redressa et fixa le psychologue, avant qu’un grand sourire commence à naître sur ses lèvres. Il se retint d’éclater de rire, mais ce fut dur. Presque aussitôt, et ne lui laissant pas le temps de faire une remarque, Rei proposa d’aller acheter quelques chose dans une épicerie qu’il avait vu. Mael n’y voyait aucun inconvénient, et il valait mieux y aller maintenant, avant qu’il ne pleuve pour de bon.

Non, rien de particulier. Essayer de ne pas trop vous perdre hein !

Il le regarda s’avancer vers la porte, et avant qu’il ne disparaisse, ajouta :

A tout à l’heure.

Il continua de fixer la porte jusqu’à ce qu’elle soit totalement refermée, puis se laissa tomber en arrière en soupirant. Il avait une demi-heure à tuer sans rien à faire ici. Il resta pensif un petit moment, jusqu’à ce qu’il se mette à penser à son téléphone. Mais oui ! Peut être avait-il un peu de réseau ... Il se contorsionna pour arriver à attraper son portable au fin fond de la poche de son jean, et le déverrouilla. Pour remarquer qu’il n’y avait pas une seule barre de réseau. Évidemment... Il soupira à nouveau, et laissa tomber son téléphone à côté de lui. Il récupéra son sac, posé non loin d’ici, et en sortit son livre qu’il était en train de lire dans le train avant que celui-ci ne s’arrête dans ce trou paumé.

Il lu ainsi durant un bon moment, jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il commençait à se faire tard et que le psychologue n’était toujours pas rentré. Il consulta sa montre, et constata que cela faisait déjà plus d’une heure qu’il était parti, et qu’il était censé rentrer au bout d’une demi heure. Il commença alors à s’inquiéter, et s’imaginer plein de trucs. Et s’il s’était perdu et ne retrouvait pas son chemin ? Et s’il avait rencontré quelqu’un qui lui avait proposé un toit, et était resté sur place, abandonnant Mael dans la cabane au froid, sans rien à manger, avec un toit qui laisse passer quelques gouttes de pluie ? Et Mael ne pouvait pas faire grand-chose, à part rester là, et attendre en espérant qu’il revienne. Il ramena ses jambes et les plia contre lui, posant sa tête sur ses genoux, et l’entoura de ses bras.

Il resta un moment ainsi, quand il entendit du bruit au dehors, puis la porte qui s’ouvre. Il releva la tête, pour regarder un Rei dégoulinant et chargé de plusieurs affaires. Le directeur se leva et alla récupérer les affaires pour les poser un peu plus loin, à l’abri de toute l’eau que le psy ramenait en s’égouttant. Il l regarda avec un air désolé, regrettant de l’avoir laissé partir, si c’est pour le retrouver dans un tel état. Surtout qu’il restait de tomber malade, s’il restait trempé. Mael dire quelque chose, quand il se mit à se déshabiller, enlevant son haut. Son regard se posa naturellement sur le torse de l’homme en face de lui, y restant quelques instants, avant qu’il ne détourne le regard, un peu gêné.

Euh, oui, bien sûr...

La remarque du psy lui avait semblé étrange, surtout la fin. Il se demanda ce qu’il avait bien voulu dire par là, mais préféra ne pas lui demander directement. Il retourna à son canapé, laissant Rei se changer, et chopé son livre. Bien que caché partiellement derrière, il ne pouvait s’empêcher de lancer quelques coups d’œil discrets envers le psychologue, dont le corps semblait presque « pur ».

Replongé dans son livre, mais peu attentif à sa lecture, il releva la tête lorsque la voix du psy retenti. Il resta bouche bée en le fixant, avant de pouvoir répondre. Ce kimono lui allait à merveille, il n’aurait pas pu trouver mieux. Et puis cet air qu’il avait, avec la serviette dans les cheveux, des mèches lui tombant sur le visage... Splendide. Heureusement d’ailleurs qu’il ne regardait pas dans la direction du directeur.

J’espère aussi...

Il l’observa sortir les affaires des sacs, remarquant qu’il avait prit des choses qu’il appréciait beaucoup, sans même le lui avoir dit avant. Il refusa poliment le café proposé, n’aimant pas cette boisson là. S’il avait du thé, il aurait dit oui, mais tant pis. Il se releva, et le rejoint à la table, se proposant de l’aider à préparer le repas.

Assez silencieusement, ils se mirent à table, dévorant la nourriture, affamés. Ce fut Mael qui, au bout de quelques minutes, brisa le silence religieux (si l’on enlève les bruits de couverts) qui s’était installé entre eux.

Vous en avez mis du temps, vous vous êtes perdu ?

Ecoutant la réponse, il sourit, amusé par cela. Au final, il s’était avéré que sa première hypothèse était juste. Ce n’était pas vraiment drôle pour Rei, mais au moins il était revenu, même si Mael s’était inquiété du temps qu’il avait mis pour un aller retour dans une épicerie pas très loin. Il se garda cependant de le lui faire savoir, et continua de manger. Lorsqu’ils eurent terminé le repas, Mael débarrassa (pas question de le laisser tout faire quand même), du moins rassembla les affaires, puisqu’il n’y avait rien ici. Il retourna alors sur le canapé en soupirant, puis se remit à fixer le plafond. Il soupira, et consulta sa montre.

Fff .... Il n’est que 20h et quelques...

Il se demandait bien comment ils allaient occuper le temps, sachant qu’il n’avait pas vraiment envie de se coucher, n’étant pas particulièrement fatigué. Sans doute Rei devait l’être, à cause de son escapade en dehors sous la pluie...

Malheureusement, Rei n’avait vu aucune réaction de la part de Mael quant à son physique. Il en déduit donc que soit le jeune homme était à cent pourcent hétérosexuel, soit Rei n’était vraiment pas son type d’hommes. Qui sait, le jeune homme préférait peut-être les hommes baraqués dans les bras desquels, il pouvait se nicher et se sentir protégés…Le jeune psychologue ne pu s’empêcher de se sentir vexé et, tandis que le directeur l’observait bouche bé, il se contentait de fixer le sol, sans le voir, en s’occupant de rajuster correctement son kimono. Pas de chance, pas de chance. Mais il fallait dire que le jeune homme possédait tout de même un égo surdimensionné qu’il était particulièrement facile à blesser alors voilà là où se situait une de ses principales faiblesses qui pouvait le rendre inattentif sur le genre de choses qu’il remarquait habituellement tout de suite.

Il s’occupa ensuite en sortant les provisions puis commença à faire la cuisine. Monsieur Fujiwara se proposa pour l’aider et le psychologue accepta naturellement son offre. Une fois les plats préparés, ils se mirent à manger dans un silence quasi-total qui était bercé par le ronronnement de la tempête et le bruit de leurs couverts jusqu’à ce que le directeur se décide à le briser en demandant :

Vous en avez mis du temps, vous vous êtes perdu ?

A la fois gêné et amusé par la question, Rei releva la tête en semblant avoir retrouvé sa bonne humeur pour répondre :

« Eh bien, je vous avais prévenu, un peu plus tôt, que je n’avais aucun sens de l’orientation et cela semble s’être confirmé ce soir. De plus, il faut avouer que je ne voyais strictement rien à cause de la pluie plutôt forte qui s’est abattue et j’ai pris du temps pour trouver le chemin pour y aller… »

Il évita soigneusement de parler de la jeune fille qui l’avait aidé et continua de manger, remarquant le sourire un peu moqueur du directeur. Le reste du repas se déroula dans le silence jusqu’à ce que Mael se décide à tout débarrasser, laissant Rei qui s’assit sur le canapé en continuant de sécher ses cheveux pour se rendre compte qu’il n’avait, désormais, plus besoin de la serviette car ils ne gouttaient plus. Il se leva donc pour aller étendre la serviette dans un endroit où l’eau ne tombait pas et il posa ses lunettes à côté, ne voulant pas prendre la peine de les déposer plus tard. Machinalement, il passa ses doigts dans ses longs cheveux pour les brosser un peu mais se rendit compte qu’il n’avait presque pas de nœuds, ce n’était donc pas dérangeant. Il s’assit de nouveau sur le canapé et regarda simplement Mael qui le rejoignait avant de regarder sa montre et d’annoncer en lâchant un soupire :

Fff .... Il n’est que 20h et quelques...

Et oui, Rei s’en était douté. La soirée risquait d’être longue.
Soudain, son nez se mit à le picoter affreusement et, ayant juste le réflexe de mettre sa main devant son nez et sa bouche, il lâcha :

« A…Aaaa…Aaaaa…Atchiiiiiiiiii ! »

Reprenant sa respiration, il rosit légèrement, se rendant compte que ses éternuements n’avaient vraiment rien de masculin. Il n’arrivait pas à les contrôler et à chaque fois qu’il éternuait, c’était toujours un distingué et très féminin « atchi » qui sortait. Il se confondit immédiatement en excuses :

« Oula, excusez-moi… Il semblerait que la nuit s’annonce fraîche et après m’être pris la pluie, je commence à m’enrhumer. Heureusement que j’ai pris des couvertures bien chaudes ! »

Il se leva d’ailleurs pour aller en chercher une et s’enroula dedans avant de fixer son compagnon de galère pour finalement lancer :

« Monsieur Fujiwara… Votre nom est japonais pourtant, vous ne semblez pas l’être à cent pourcent, non ? Vous avez des origines européennes ? Votre splend…Euh….Vos…Fin… »

Il avait failli dire « votre splendide physique » par habitude de franchise lorsqu’il reconnaissait la beauté de quelqu’un mais il venait de se rappeler qu’il avait affaire à son supérieur. Il ne pouvait donc pas lui dire « vos superbes cheveux caramels aux reflets dorés », « vos adorables yeux noisette que l’on aurait envie de croquer » ou des choses du genre…
Rougissant carrément suite à son erreur, il préféra détourner le regard et continua immédiatement, préférant dissiper immédiatement son malaise :

« Vos cheveux et vos yeux semblent indiquer que vous n’êtes pas seulement japonais. Mais après tout, cela ne me regarde pas. Désolé d’avoir posé la question. »

Il se releva pour aller regarder par la fenêtre, collant son visage brûlante contre la vitre glacée en espérant qu’il reprenne au plus vite une couleur normale mais, il ne s’attendait pas à ce que ses oreilles aient également pris la couleur rouges et que cela se voyait de derrière…

A l’instant où le directeur regardait sa montre, il s’était dit la même chose que son collègue : que la soirée allait être longue ... ! Il soupira à nouveau, le regard vague vers le plafond. Lorsque soudain, le psychologue à ses côtés se mit à éternuer, ce qui le fit légèrement sursauter. C’était assez étonnant, l’homme avait eu un éternuement assez distingué, digne d’une femme. Il s’excusa dans la foulée, arguant qu’il avait sûrement du prendre froid au cours de son escapade sous la pluie. Il se leva alors, après avoir mentionné les couvertures qu’il avait acheté, pour justement aller en chercher une, revenir et s’enrouler dedans.

Mael ramena ses jambes contre lui afin de se tenir un peu plus chaud, et posa ensuite la tête sur ses genoux. Il sentait le regard de son collègue posé sur lui, mais il n’y prêta pas attention (du moins pas en apparence), quelque peu gêné. Avait-il quelque chose sur le visage, une miette, un grain de riz ? Ou autre chose ? Après d’interminables secondes, Rei prit la parole, lui demandant s’il avait des origines européennes. C’était donc ça... Mais même, Mael n’avait pas tellement apprécié d’être dévisagé de telle sorte, enfin du moins plus mal à l’aise que dérangé. A la fin de sa phrase, son interlocuteur se mit à bafouiller et rougir en même temps, ce que le directeur trouva assez amusant. Il avait commencé à dire quelque chose, et s’était subitement arrêté, se perdant dans sa phrase. Le directeur aurait bien aimé avoir la suite. Qu’allait-il dire ? « Votre splend ». Splendide ? De quoi voulait-il parler ?

Mael n’eut de toute façon pas le temps de l’inciter à continuer sa phrase, puisque, embarrassé, Rei reprit sa phrase plus calmement, expliquant le pourquoi de sa question précédemment posée. Il se leva ensuite pour se diriger vers la fenêtre et s’y coller. Mael l’observa faire, perplexe. Qu’est ce tout cela voulait dire ? Il avait finit le visage carrément rouge (ses oreilles en témoignaient encore), visiblement gêné, évitant son regard. Après quelques secondes, Mael se leva à son tour, et se dirigea vers le psychologue, s’arrêtant au niveau de la table sur laquelle il posa les fesses, à moitié assis dessus. Ignorant la situation, il répondit à la question du psy, la tête baissée, fixant ses pieds.

Ma mère était Anglaise. C’est pour ça.

Il préféra ne pas trop s’étendre sur le sujet, celui-ci lui rappelant de bons souvenirs, comme de mauvais. Sa mère était morte depuis presque une dizaine d’années, mais cela restait encore frais dans son esprit, surtout depuis que la santé de son père s’était aggravée. Il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre, et Mael se retrouverai seul. Il s’était déjà fait à l’idée, depuis qu’il avait su pour son père, mais cela restait dur. Afin de ne pas retourner sur le sujet, il préféra conclure brièvement, d’un ton un peu trop sec :

Enfin bref.

Il resta là où il était, relevant la tête pour observer le psy. Enfin, ce fut assez bref, car celui-ci s’était retourné et l’observait aussi. Du coup, Mael détourna le regard, pour le poser sur le mur vierge de tout poster ou autre chose qui pourrait être accrochée. Il se sentait de nouveau mal à l’aise.

[désolé c'est pas top, j'essayerai de me rattraper au prochain >_< )

Relativement gêné, Rei essayait de reprendre ses esprits. A la fin, il ne savait plus vraiment s’il jouait la comédie ou s’il se retrouvait réellement embarrassé devant les évènements présents.
Le directeur semblait tellement inaccessible pour lui, qu’il s’en retrouvait tout émoustillé. Le psychologue n’avait, en effet, jamais ressenti autant de froideur et de résistance et il ne savait plus vraiment où il en était. Il pourrait très bien utiliser la force pour obtenir ce dont il avait envie mais, il n’en retiendrait aucune fierté. Pire encore, il se dégoûterait lui-même de réagir de la sorte. En tant que psychologue, il ne pouvait vraiment pas se permettre de rentrer dans ce genre de mentalité. Autant garder un peu d’humanité en lui, autant n’être pas complètement pourri jusqu’à la moelle. Non ?

Ma mère était Anglaise. C’est pour ça.

Surpris, il releva la tête. Ah oui, il avait posé une question. Donc le directeur avait des origines anglaises… La mère du psychologue avait également des origines européennes : françaises pour être exacte et il failli ouvrir la bouche pour le signaler, espérant ainsi relancer la conversation lorsque le blond le devança pour lâcher :

Enfin bref.

Le ton était sec, beaucoup trop sec. Sous le choc, le psychologue perdit toutes ses couleurs et il se retourna immédiatement pour fixer le jeune homme. Parler de sa famille sembler lui demander beaucoup d’efforts. Il remarqua enfin qu’il venait de parler de sa mère au passé et il comprit enfin que celle-ci devait être décédée. Le psychologue se mordit la lèvre en fixant le sol, perdu dans ses pensées. Si jeune et pourtant déjà confronté à la mort, aux responsabilités et à tout ça. Cela devait être dur, Rei comprenait enfin pourquoi le jeune éphèbe était si froid et si réservé. C’était tout à fait compréhensible…
S’il était devenu psychologue, c’était pour aider les personnes comme cet homme. Les personnes en souffrance permanente qui ne s’en rendait pas forcément compte. Il voulait les soulager. Malgré le fait qu’il était un égocentrique fini, malgré le fait qu’il ne pensait qu’à lui et qu’il se fichait des autres, malgré le fait qu’il n’était qu’une infâme saloperie prête à tout pour arriver à ses fins et qu’il était pourri de l’intérieur, Rei voulait les aider.
Oh, chers lecteurs, ne vous mettez pas à regarder avec compassion ce jeune homme. Il n’a pas changé d’un pouce. S’il faisait ça, c’était avant et surtout pour lui-même. Pour soulager sa conscience. Pour exterminer la haine et la souffrance qu’il avait accumulées en lui. Oui, c’était pour lui et uniquement pour lui.

Relevant la tête, il passa une main dans ses cheveux encore un peu humides pour se dégager le champ visuel avant de lâcher un demi-soupir. Il était déjà en panne d’inspiration et ne savait plus vraiment quoi faire. Peut-être laisser ce silence embarrassé planer ?
Il ressentait que le directeur était mal-à-l’aise mais il ne savait pas vraiment quoi faire pour détendre l’atmosphère. Il prit donc le temps de se creuser la tête lorsqu’un coup du destin décida de leur donner de l’occupation. L’orage commençait à faire rage et un éclair décida de tomber pile à côté de leur cabane, faisant péter les plombs. Ainsi, la seule source de lumière, une petite ampoule qui se trouvait au-dessus de la table s’éteignit, les plongeant dans le noir le plus complet. Ne voyant absolument rien, Rei essaya de détendre un peu l’atmosphère qui devenait de plus en plus tendue en déclarant :

« Je crois avoir vu des chandelles dans le coin, ne bougez pas, j’y vais. »

Malheureusement, il n’y voyait absolument rien. Et là, ce fut le début d’une rude épreuve. Mettre un pied dedans l’autre, agitant les mains devant lui pour chercher un éventuel obstacle. Obstacle qui ne tarda pas à faire son apparition, en effet, il se prit les pieds dans une serviette et se sentit basculer en avant. Etouffant un cri, il se raccrocha à la première chose venue : une chose chaude, douce et moelleuse qui cria, elle aussi.
Elle se retrouva sous lui, et, complètement déstabilisé, ayant perdu tous ses repères, le psychologue tenta un timide :

« Ah…Euh…Je…Excusez-moi… Rien de cassé ? »

Il tenta alors de se relever, tout en empêchant ses cheveux de chatouiller le pauvre monsieur Fujiwara qui ne devait rien comprendre à la situation. Et ce fut à ce moment-là que la lumière se ralluma. Elle se ralluma sur un psychologue complètement déstabilisé, rouge de honte, les cheveux l’empêchant de voir correctement. Mais le pire, oui, le pire pour ce pauvre Rei, c’est que son kimono bleu ciel glissait dangereusement et que son épaule droite était plus que dénudée, si bien que s’il se relevait trop brusquement, il risquait tout simplement de l’arracher. Problème ? Le kimono en question était coincé sous ses genoux et il devrait pencher le visage pour lever son arrière-train afin de le débloquer.
Bon… Dis comme ça, cela ne semblait pas être un véritable souci, mais n’oublions pas que le cher Rei ressentait une certaine attirance vis-à-vis de son supérieur et que les lèvres charnues et légèrement rosées de celui-ci semblaient lui lancer un appel à la débauche la plus pure. Que faire ? Que faire, que faire, que faire ?
Les citations d’un auteur anglais, Oscar Wilde, qu’il connaissait depuis maintenant un bon bout de temps lui revinrent en mémoire :

« Le meilleur moyen de résister à la tentation est d’y céder. »
« Je préfère avoir des remords, plutôt que des regrets. »

Et ces deux simples phrases. De simples citations. Stupides et toutes faites… Reflétant la pensée d’une autre personne, d’une autre époque, d’un autre contexte. Mais aussi les jolies lèvres guimauves qui semblaient l’appeler. Tous ces facteurs le firent se décider et, sans relever l’arrière-train pour chercher à se dégager, il se contenta tout simplement de baisser le visage, comme soudainement possédé, pour capturer les délicieuses lèvres.
Dieu qu’elles étaient douces, humides sans trop l’être, appétissantes, délicieuses, tentantes, gourmandes ! Rei les aimait tout simplement. Il aurait voulu les goûter encore et encore lorsque la dure réalité arriva directement sur lui, comme s’il venait de se prendre une gifle.
Il laissa basculer brusquement en arrière, ouvrant alors son kimono, puisqu’il n’avait pas pris le temps de se dégager correctement et devint complètement pivoine en bégayant :

« Oh mon di….Oh…Je…Mais…Je suis affreusement désolé ! Veuillez m’excuser… Je… Je crois que je vais aller faire un tour, je…Olala… Je ne sais vraiment pas ce qu’il m’est passé par la tête… Je…Je suis franchement désolé… »

Bon…Pour tout vous avouer, il était terriblement gêné d’avoir agit ainsi mais…Il ne le regrettait absolument pas. Du moins, pour l’instant. La réaction de son supérieure ne s’était pas encore faite attendre et il se mordit violemment la lèvre, savourant encore le goût de celles du directeur qu’il gardait sur les siennes, tout en espérant que la réaction ne soit pas trop violente…

Le regard fixé sur le mur, celui-ci disparut soudainement, comme tout le reste du décor. Ils avaient été soudainement plongés dans le noir, quelques secondes après un coup de tonnerre plus impressionnant que les autres. Manque de bol, le coup de foudre tombé non loin venait de leur couper l’électricité. Déjà que la seule ampoule de la pièce éclairait pas très bien, voila qu’ils n’avaient plus rien. Heureusement, le psychologue affirma avoir aperçu des chandelles un peu plus tôt. Mael n’y avait pas fait attention, mais s’ils avaient au moins ça, ce serait déjà pas mal. De toute façon, il n’avait pas fait gaffe à où se trouvait le disjoncteur, et n’avait pas l’intention de longer tous les murs à l’aveuglette dans l’espoir de trouver.

Tandis que Rei était parti à la recherche des dites chandelles, Mael décida de bouger et de tenter de regagner la canapé en attendant. Chose qu’il n’aurait pas du faire. N’y voyant strictement rien, et se fiant à son orientation pas très bonne (surtout dans le noir en perdant tous ses repères), il eut à peine le temps de faire trois pas qu’il se heurta à quelqu’un. Ce quelqu’un ne pouvait être que le psychologue. Le directeur ne put empêcher un cri de surprise s’échapper de ses lèvres, tandis qu’il fut entrainé dans une chute inévitable, poussé par le psy.

Tout se passa très vite, et l’atterrissage fut assez douloureux. Par réflexe, Mael amortit un peu sa chute en se réceptionnant sur les mains. Cependant, il servit lui-même de matelas au psy, qui ne du par conséquent pas se faire bien mal. Heureusement, le directeur ne semblait pas être blessé. Du moins, aucune douleur vive digne d’une fracture n’apparaissait. Il aurait quelques gros bleus un peu plus tard, c’est tout... D’ailleurs, la voix proche du psy vint lui poser la question, sur un ton gêné. Sur le coup, Mael prit alors un ton rassurant :

Non ça va, tout va bien, normalement...

Tandis qu’il essayait quand même de percevoir quelque chose dans cette obscurité, la lumière revint tout aussi soudainement qu’elle était partie. Finalement, cette coupure n’aura pas duré bien longtemps, mais causé bien des dégâts. Sur le visage de Rei, entre autres. A présent que la lumière était revenue, Mael fixait celui qui se trouvait toujours sur lui, et qui se faisait d’ailleurs un peu lourd. Son visage avait fortement rougit, et bien que quelques mèches de cheveux cachaient celui-ci, le directeur ne put ne pas remarquer sa gêne.

Mael l’était aussi, gêné. Il ne pouvait bouger tant que Rei ne bougeait pas lui-même, et celui-ci semblait comme paralysé. Déviant son regard de ses yeux, il tomba sur l’épaule du psy quasiment totalement dénudée. Sa peau si pâle avait l’air douce ... Qu’il la toucherait bien pour vérifier... Non ! Il ne pouvait pas. Cela ne se faisait pas, voyons. Il restait quand même le psy de son lycée...

Le directeur n’eut pas le temps de réfléchir plus longtemps, surprit par le visage du psy qui se rapprocha dangereusement du sien. Stupéfait, Mael ne fit rien pour l’arrêter et se laissa faire lorsque leurs lèvres entrèrent en contact. Le baiser fut bref, et le psy se redressa soudainement, se fondant en excuses. Mael le fixa quelques instants, le regard neutre, puis, sans réfléchir plus, il attrapa le psy par la nuque et l’attira contre lui, avant de l’embrasser à son tour. Cette fois, il en profita pour approfondir ce baiser, sa langue se frayant passage au travers des lèvres du psy pour y trouver sa comparse. Sa main gauche, toujours posée sur la nuque du psy, l’autre vint se faufiler sous le kimono et se posa sur son dos, exerçant une légère pression, gardant le corps près du sien. Après de longues secondes interminables, le directeur stoppa le baiser, plongeant son regard dans celui du psychologue.

Faire un tour, par ce temps ... ?

Dans la seconde qui suit, il repoussa le psychologue pour se libérer un peu, et le fit pivoter, échangeant ainsi les positions. Il le fixa à nouveau droit dans les yeux, puis reprit le baiser précédemment interrompu, tandis que ses mains en profitèrent pour se poser sur le torse imberbe du psy. Sa peau était si douce, comme il l’avait pensé. Douce et agréablement chaude...

Tout ça, c’était de la faute du psy. S’il ne s’était pas foutu à poil devant lui, avec ce corps si attirant, et s’il ne l’avait pas embrassé comme ça, il ne se serait rien passé. Non, c’était vraiment de la provoc’ et Mael ne faisait qu’y répondre. Il ne pouvait pas non plus résister à une telle tentation ...

Enfermé dans une cabane, en pleine nuit, avec l’objet de ses fantasmes. Une panne d’électricité, une chute, deux visages rapprochés. La distance respectueuse considérablement réduite, le contact des deux peaux. Tout cela, n’était-ce pas un signe du destin ? Rei ne croyait pas au destin, il ne croyait en rien. Mais… Mais, il ne pouvait s’empêcher de penser qu’il ne devait rater cette occasion en aucun cas. Le jeune homme se pencha donc pour réunir leurs deux bouches en un bref baiser. Un baiser volé, un baiser empli de son désir ardent mais pourtant si maladroit. Un simple baiser.
Pourtant, il se rendit bien vite compte que cela avait été une grosse erreur de sa part. Il aurait du résister à la tentation. Devant lui se tenait son supérieur, il venait de commettre un acte irréparable et il devrait bientôt assumer ses actes. Retenant un demi-soupir, il se résigna à avoir une réaction violente. Mael était hétéro à 100% et ça, le psychologue en était sûr. Il ne pouvait pas ressentir le moindre sentiment pour les hommes et, même si le jeune éphèbe était particulièrement féminin, il demeurait tout de même un homme. Cela se passerait mal d’ici quelques minutes…

La main de Mael commença à s’avancer vers lui, elle semblait énorme vue sous cette angle et, le psychologue ne pu s’empêcher de fermer les yeux, trop effrayé pour la voir s’abattre sur sa joue. Elle ne le frappa pas. Elle se glissa sous ses cheveux, sur sa nuque et avança son visage jusqu’à ce qu’il sente de nouveau les lèvres guimauves sur les siennes.
Surpris, Rei ouvrit et écarquilla les yeux, restant tout d’abord passif. Il sentit une intruse essayer de s’infiltrer dans sa bouche et ne tenta rien pour la retenir. Pire encore, il l’accueillit joyeusement, lui procurant de douces caresses langoureuses.

Oh, et tant pis !

Se laissant complètement entraîner, il ne tenta plus de réfléchir, d’essayer de comprendre ce qu’il lui arrivait et il laissa son corps agir à sa place. Prolongeant à son tour le baiser, il frissonna lorsqu’il sentit la main chaude du directeur s’infiltrer dans son kimono pour le retenir contre lui. Comme si Rei tenterait de s’échapper, franchement… Il se sentait trop bien pour tenter de s’enfuir. Il n’était pas fou, le psychologue !
Mais les meilleures choses ont toujours une fin. Le baiser fut rompu et Rei, encore un peu déstabilisé par la tournure des évènements, sentit sa respiration s’accélérer. Il étouffait dans ce pauvre kimono, il espéra que celui-ci dégage rapidement afin de pouvoir essayer de se reprendre un peu. En fait, il était dans un état étonnement anormal… Il était glacé mais il crevait de chaud, sa respiration faisait des siennes et les battements de son cœur n’en faisaient qu’à leur tête. Il avait l’impression que son cœur était monté au niveau de ses tempes et il les sentait battre à toute allure, perdant la notion du réel.
Et puis, Mael n’arrangeait pas les choses en plongeant ses sublime yeux noisettes dans ceux améthyste du jeune homme. Rei avait l’impression de se noyer dans leur éclat caramel et il adorait ça ! Sa voix particulièrement sexy au vu du contexte résonna dans la cabane tout en lâchant :

Faire un tour, par ce temps ... ?

Le jeune psychologue déglutit avec peine, se laissant totalement faire lorsque Mael changea leurs positions pour le dominer et, plongeant une nouvelle fois dans l’immensité mystérieuse de ses yeux marrons. Il se réchauffait à toute vitesse, sentant que son corps et son cœur allaient bientôt exploser à l’unisson. La pression devenait de moins en moins supportable et Rei n’avait qu’une envie, dévorer le beau garçon face à lui. Le dévorer tout cru, tout entier. Ne rien laisser de lui, aucune miette, rien.
Le baiser reprit et il étouffa un léger gémissement lorsque les grandes mains, les mains si douces, les mains si chaudes et si sexy sur lesquelles il avait tant fantasmés commencèrent à le toucher, ô lui, pauvre mortel fondant entre les bras de ce dieu anglais. Il se noyait, il perdait pied avec la réalité, ne devenant plus qu’une boule de sensations. L’odeur, son odeur puissante et hypnotisante qui prenait tout son nez, qui s’incrustait en lui, devenait la sienne. Ses mains touchant son corps, sa respiration peut-être un peu moins contrôlée, sa peau semblant presque caramel à côté de la sienne trop blanche.

Le baiser fut une fois de plus rompu, avec difficulté.

Reprenant de l’oxygène, il trouvait celui-ci bien fade par rapport à l’odeur délicieuse du directeur. Il le voulait pour lui, rien que pour lui. Juste cette nuit, il avait besoin de lui. De son odeur, de ses mains, de la chaleur de son corps, de la rudesse de celui-lui. Haletant, il lâcha :

« Finalement….Je…Je crois que je vais rester… »

Spoiler:

Puis ils s'endormirent, enlacés et complètement vidés par cette journée remplie en émotions.
Le lendemain, Rei fut le premier à se lever. Il s'habilla. Il chercha, ensuite, dans les provisions qu'il avait amassé la veille et il fut capable de préparer un petit déjeuné digne de ce nom.
Lorsque celui-ci fut prêt, il sortit dehors et regarda le ciel bleu à travers les branchages. Le temps était magnifique, ils pourraient rentrer le jour même. Un petit sourire apparut sur ses lèvres tandis qu'il rentrait et il apperçut le directeur qui s'éveillait. Nouveau sourire, il lui dit avec bonne humeur :

"Bonjour, le petit déjeuné est servit !"

Il espéra ne pas retrouver le malaise du lendemain...

Ce n’est que vaguement que Mael perçut le mouvement de Rei quittant le canapé-lit, sa chaleur remplacée par un petit courant d’air frais. Cependant, il ne réagit pas plus que par un léger grognement, retombant dans le sommeil qu’il avait à peine quitté. Il dormit encore ainsi un petit moment, jusqu’à ce que le faisceau de lumière à l’ouverture de la porte l’éblouisse et lui fasse prendre conscience de son environnement. Il grogna à nouveau et tourna le dos à la porte, restant ainsi jusqu’à ce que la porte s’ouvre de nouveau. Cette fois, il se redressa en baillant, et remis en arrière les mèches de cheveux qui lui tombaient sur les yeux. Une voix familière lui annonça que le petit déjeuné était servi.

Le directeur dirigea son regard vers le psychologue et lui rendit son sourire, accompagné d’un regard observateur. Il avait remis le kimono qu’il avait acheté la veille, et gardé sur lui à peine plus de quelques minutes. Il lui allait d’ailleurs toujours aussi bien, Rei était vraiment très beau là dedans.

Bonjour Rei chan. =)

Se décidant à se bouger, Mael se rhabilla à son tour, puis alla rejoindre le psy, posant au passage sa main sur sa hanche, et le contourna par la suite. Il se contenta d’un baiser déposé délicatement sur sa joue, et s’éloigna en souriant. Il repensait à la nuit qu’ils avaient passé, et se retenait à présent de ne pas lui sauter dessus. Lui tournant le dos, il se mordit la lèvre puis se dirigea vers la table et s’installa, contemplant le petit déjeuner de fortune qu’il leur avait préparé. Il lança ensuite un regard vers le psy, accompagné de son sourire charmeur.

Merci pour ça. Tu viens manger ?

Il poussa du pied la chaise en face de lui pour l’éloigner de la table et la désigna du regard. Il attendit que Rei se soit installé pour commencer à manger, avec l’appétit de celui qui n’a pas mangé depuis plusieurs jours. Malheureusement, il n’y en avait pas beaucoup non plus, et il du se retenir pour en laisser un peu au psy. Le silence s’empara de la cabane, laissant seulement filtrer les bruits qu’ils faisaient en se servant tel ou tel aliment. Afin de rompre ce silence qui devenait désagréablement pesant, Mael finit par reprendre la parole, fixant le bel homme en face de lui toujours en souriant :

Tu t’es levé y’a longtemps ?

[ Joyeu Nowel =D ]

Et le beau directeur émergea. Quelques mèches de cheveux lui tombaient négligemment sur le visage, lui donnant un air un peu ébouriffé et franchement sexy. Franchement, le jeune psychologue n’avait pas l’habitude de voir quelqu’un d’aussi beau dès le lever. La plupart du temps, ses amants cassaient le mythe du « beau-gosse » dès le lendemain avec une mine de déterré. Peut-être était-ce parce qu’ils n’avaient pas bu et qu’ils étaient donc frais et dispo dès le lendemain. Rei sourit avec amusement en le voyant bailler en se dégageant le champ de vision.

Son sourire amusé se transforma en mine légèrement gênée lorsqu’il l’accueillit à coup de « Rei-chan » et d’un sourire franchement adorable. Quelle idée d’être aussi beau dès le matin, aussi… Si le psychologue ne s’écoutait pas, il aurait immédiatement sauté sur son collègue sans lui laisser le temps de réagir. Mais comme il n’était pas franchement une bête sauvage assoiffée de sexe, il se contenta de détourner légèrement son regard, évitant de le laisser se perdre sur la nudité de Mael et de son sourire renversant.

Il sentit de l’agitation et reporta son regard sur le jeune homme qui s’habillait, il l’observa un instant avec un sourire avant de continuer à s’activer pour terminer la table. Il avait dû remettre son kimono car ses vêtements de la veille étaient encore trempés et qu’il n’avait rien d’autre à se mettre. Il pensait qu’il serait obligé de rentrer comme ça chez lui mais ce n’était pas si dérangeant, Rei adorait les kimonos après tout. Il espéra que cela ne gène pas trop son collègue.

Mael s’approcha finalement de lui et il posa une main sur sa hanche, sursautant légèrement, le jeune androgyne sortit de ses pensées et le regarda avec un air agréablement surpris. Il sourit lorsque celui-ci lui déposa un baiser sur la joue et il faillit fondre devant son sourire charmeur lorsque celui-ci lui demanda de le rejoindre.
Au fond de lui, le français était ravi car il avait eu peur qu’une nouvelle atmosphère gênée s’infiltre entre eux mais justement, cela avait été le contraire. Le directeur s’ouvrait maintenant beaucoup plus.

C’est donc avec un sourire franchement épanouit que le psychologue s’assit en face de lui tout en lâchant un petit :

« Oui. »

Élégant et silencieux, on aurait pu croire une jeune fille de la bonne société qui n’osait parler devant celui qu’elle aimait. A cette pensée, ses joues se colorèrent, il avait honte d’être aussi pathétique et il fit un petit sourire à Mael qui lui demandait s’il s’était levé depuis longtemps. Il n’avait même pas remarqué le silence qui s’était installé entre eux. Il répliqua :

« Non, j’ai juste eu le temps de préparer le petit déjeuné et d’aller voir le temps dehors. »

Un sourire doux étira ses lèvres alors qu’il continuait :

« Le temps est radieux, nous allons pouvoir rentrer Mael. »

Il croisa ses mains au-dessus de la table et rougit en détournant son regard avant d’avouer, plus doucement :

« D’un certain côté, ça m’attriste un peu… Ta compagnie m’était vraiment très agréable… »

Rei ne s’en était pas rendu compte mais son masque de dragueur invétéré avait disparu depuis un bon bout de temps et il était maintenant plus qu’honnête avec le directeur. Il lui offrit un sourire radieux, ses améthystes pétillant de bonne humeur.

[Merci, joyeux noël à toi aussi

]

Avalant un morceau de pain, Mael fixait le psychologue, qui venait de répondre à sa question. Il lui avait semblé pourtant que cela faisait plus longtemps, mais il ne fit pas de remarque là-dessus. Il tourna la tête vers la fenêtre lorsqu’il parla du temps qui faisait, constatant qu’effectivement, il faisait beau. Tant mieux. ce n’est pas qu’il détestait cet endroit, mais il avait d’autres choses à faire, et qu’il devait faire avant la fin du week end. C’est d’ailleurs dans des moments pareils qu’il bénissait l’existence des combini, ce qui lui permettrai en rentrant de faire les courses qu’il n’avait pas pu faire la veille, à cause de ce problème de train et de leurs aventures dans ce village perdu.

Toujours tourné vers la fenêtre, il reporta son attention sur Rei lorsque sa voix parvint à ses oreilles, et le fixa. Il avait à présent un air gêné, ce qui le rendait encore plus mignon. Cette rougeur sur les joues lui allait si bien. Mael lui-même se sentait gêné par cette remarque, mais ne le montrait pas. Sûr, ils avaient passé de bons moments ensemble, il n’allait pas le nier. Mais il relativisait, ce n’est pas comme s’ils n’allaient plus se voir. Ils travaillent au même endroit, tout de même.

Il lui rendit son sourire, certes pas aussi beau que le sien, pour répondre :

Merci... Mais de toute façon on va pas rester là éternellement, ça va pas être possible.

Ça, c’est sûr... surtout que là, il rêvait d’une bonne douche chaude et d’un bon lit douillet pour la prochaine nuit, chose qu’ils ne pouvaient pas avoir ici. Et puis il avait un lycée à gérer et il ne pouvait pas se permettre de s’absenter sans prévenir. Chose qui s’avère compliquée ici, vu le manque complet de réseau dans ce soin paumé.

Se levant de sa chaise, Mael embarqua les déchets sur la table pour les mettre dans le sac poubelle improvisé avec un des sacs plastiques ayant servi à ramener les achats de Rei, et retourna vers le canapé miteux pour rassembler ses affaires.

Je ne sais pas à quelle heure est le prochain train, mais il ne doit pas y en avoir très souvent. Vaut mieux y aller maintenant.